
Le cinéma est un domaine où le sexe n’a jamais été l’apanage d’un cercle. Pourtant, très tôt dans son histoire, des films X ont été conçus pour les hommes qui aiment les hommes. L’Enfer de la Bibliothèque nationale en détient les secrets, exposés toutefois à l’occasion, comme ce fut le cas en 2007-2008, toutes sexualités confondues, et avec un succès public qui rend le catalogue de cette exposition introuvable aujourd’hui.
Par Cyril Mestourt
Cependant, l’objet de cet article est d’évoquer, plus que le cours historique de ces productions d’ailleurs internationales, celui des lieux français où elles furent montrées… pour le plus grand plaisir des spectateurs agissant, acteurs à leur tour, dans les salles, les couloirs parfois, les pissotières souvent. Rencontres favorisées par l’anonymat d’un domaine clos environné d’ombre, presqu’exclusivement viril, ouvert aux tentations d’une main (ou plus) offerte, sans autre condition que le partage d’un plaisir furtif, favorisé par des images moins érotiques que franchement pornographiques, le plus souvent hétérosexuelles.
Les films pornographiques - le cinéma est inventé, ou plus exactement labellisé par les frères Lumière, en 1895 - furent d’abord distribués dans les maisons closes, dont les plus fameux ont souvent l’allure d’un hôtel « bien sous tout rapport », comme ce fut le cas du Marigny, au 11 de la rue des Arcades, à Paris. Il existe toujours mais s’est reconverti dans l’hôtellerie traditionnelle. Il fut jadis fréquenté par les « invertis », dont Marcel Proust, et s’était spécialisé dans « la réunion d’adeptes de la débauche antiphysique » (parce que trop physique précisément), sinon autorisée, du moins institutionnalisée, quoique sous surveillance hautement policière.