
Publié aux éditions Libertalia, « Fille à pédés » nous plonge dans une biographie intime autour de l’auteure elle-même Lola Miesseroff. A coup d’anecdotes personnelles et d’épisodes contextualisées, c’est une œuvre pleine d’histoires et chargé d’Histoire qui nous est contée.
« Beaucoup de femmes ont eu une enfance rangée ou dérangée, la mienne aura plutôt été de l’espèce dégenrée. ». Sur cette phrase forte et significative, Lola, Hélène de son vrai nom, Miesseroff, plante le décor de son histoire personnelle, unique entre toutes. « Né à l’automne de l’an 1947 », l’auteur met en abîme une complète éducation de l’enfance à l’âge de raison, entourée par des hommes : Micha, Ahmed Salah Boulgorah dit « Boule » jusqu’à ses plus intimes amis et amants Diego, Christian, Martin, Teddy ou encore Elian. C’est le point de départ d’un long récit dont la finalité est la consécration d’une étiquette qui lui collera à la peau toute sa vie, « Fille à pédés ».
Au fil de la trame de son livre, Lola Miesseroff manie avec intelligence les codes sociaux, politiques et identitaires pour mieux les détourner. A tel point que la non-normalité, pourtant atypique et stigmatisante à son époque, est banalisée. La nudité, qu’elle a expérimentée avec ses parents, devient alors une pratique commune, au même titre que l’échange des noms entre chaque sexe, faisant d’une Monique un garçon et d’un Richard une fille, et du rapport à la sexualité et au genre. Tout la magie s’opère alors, sensible au lecteur, portée par l’immersion dans la vie d’une petite fille, puis jeune femme et dame d’âge mûr en avance complète sur son temps.
Lola, (au) cœur de l’Histoire
Intimement liée à une existence faite de libertés, « Fille à pédés » est aussi l’histoire d’une femme militante, souvent avec les hommes et parfois contre les femmes. Dans un rythme effréné, Lola Miesseroff balaie toutes les actions coup de poing du revers de sa divine plume : révoltes de Mai 68, premières émeutes du Front Homosexuel d’Action Révolutionnaire (FHAR) en France, droit à l’avortement, lutte contre l’homophobie, dénonciation des morts liées au SIDA et même l’union homosexuel.
Tel un reflet dans le miroir, Lola Miesseroff est également la spectatrice de son époque, consacrant une divine plongée du lecteur par-delà son regard, ainsi placé aux premières loges. Sans rien oublier, l’auteure passe au crible tout élément qu’elle juge d’importance majeure. Elle y parle des premières « folles de Paris », de la popularisation des pissotières au sein de la population gay masculine, des apprentis gigolos, des travestis et même des personnes trans. Le clou final, un savant mélange entre passé et présent, interconnecté entre de nombreux flashbacks immersifs. Un pur délice.
Plus d’infos :
Découvrez l’histoire personnelle de Lola Miesseroff, avec « Fille à Pédés », disponible en ligne sur le site de la librairie Les Mots à la Bouche.