Arnaud Alessandrin, « Les enquêtes signalent un maintien élevé du niveau de discriminations transphobes”

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Arnaud Alessandrin, docteur en sociologie à l’université de Bordeaux et auteur de nombreux livres et articles sur le sujet des transidentités, du genre et des homophobies, tire un constat du taux de transphobie en France aujourd’hui dans une interview inédite pour Garçon Magazine. 

Qu’en est-il aujourd’hui de la transphobie en France, Arnaud Alessandrin ?

On peut dire sans trop exagérer que la question de la transphobie qui était confidentielle il y a quelques années est aujourd’hui connue par un plus grand nombre. D’autre part, on assiste à un affaiblissement du seuil de tolérance vis-à-vis de la transphobie, notamment du côté des jeunes générations. La lutte contre la transphobie a su imposer un renversement. On ne se demande plus « pourquoi » les personnes transitionnent.

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On se demande « comment » peut-on encore être transphobe aujourd’hui ? Les diverses prises de paroles des personnes trans contribuent fortement à cela. Enfin, alors que les chiffres et les témoignages restent massifs, l’éducation nationale, la santé ou bien encore de nombreux services publics locaux (pour ne citer qu’eux) ne sont pas au niveau des enjeux relatifs au respect des personnes trans. 

Dans votre ouvrage « Sociologie de la transphobie » publié en 2015, les chiffres étaient déjà inquiétants. La situation est-elle pire ou s’est-elle améliorée ?  

Pour comparer, il aurait fallu que la recherche s’engage de nouveau dans un chiffrage de la transphobie. Or, il n’en est rien. Par conséquent, on ne saurait trop qualifier l’évolution de la transphobie d’un point de vue chiffré. Depuis 2016, l’accès au changement de prénom et de la mention de sexe à l’état civil a été facilité, mais a aussi contribué à mieux défendre juridiquement les victimes. 

Toutefois, certaines enquêtes signalent un maintien élevé du niveau des discriminations transphobes. L’enquête « santé LGBTI » montre que plus de 80% des personnes trans ont vécu une expérience scolaire « très mauvaise » et que plus de 60% de ces mêmes répondant.e.s ont eu le sentiment d’être discriminés dans l’univers du soin. Des chiffres très proches de l’enquête « transphobie » dont est issu le livre que vous évoquiez. 

Observe-t-on une libération de la parole des personnes trans ces dernières années ? Un véritable ras-le-bol d’être laissé pour compte ? 

À la manière des #metoo ou #balancetonporc, les personnes trans s’expriment plus que jamais sur les réseaux sociaux. La multiplication des podcasts, collectifs, associations trans ou publications militantes sur ce sujet montrent que la question trans est aujourd’hui plus visible qu’elle ne l’a jamais été.

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Cette visibilité à un coût et le cyberharcèlement, ciblant certaines personnes trans, s’accroît en conséquence. Cette prise de parole se complexifie aussi : des personnes plus jeunes, des garçons trans, des parents trans, des hommes enceints… Autant de points de vue qui incarnent la multiplicité des parcours de vie trans.

Découvrez la suite de l’interview avec Arnaud Alessandrin dans le nouveau numéro de Garçon Magazine.

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