Rémi Dos Santos intègre le Refuge en février 2020. Grâce à l’aide de la direction (de l’époque), il retrouve la joie de vivre et d’être lui-même, mois après mois. Aujourd’hui, le bénévole entend rendre la pareille en s’engageant auprès de la Maison des Anciens Jeunes (MAJ) et en accompagnant des jeunes.
Rémi, dans quelles circonstances avez-vous été accueilli par la fondation ?
J’ai intégré le Refuge le 28 février 2020. Alors que je rentrais chez moi (ma famille, NDLR), j’ai trouvé mes affaires sur le palier de la porte. C’était un choc, le ciel me tombait sur la tête. J’étais à la rue.
Sans m’en informer, mon ex de l’époque a contacté l’association (son statut, à ce moment, NDLR). J’ai alors reçu un appel de Véronique, qui s’occupait de la ligne d’urgence, puis de Céline, pour discuter de mon parcours et de mon histoire de vie.
Par la suite, cette (seconde) personne m’a dit : “tu peux partir le 28 février, si tu le souhaites, à 17h04 pour aller à Angers”. Je lui ai répondu : “Je prends mes affaires et j’arrive”.
Vous avez donc passé quelques mois au sein de la structure. Que vous a-t-elle apporté, humainement parlant ?
Le Refuge m’a sauvé la vie, clairement. J’ai pu travailler sur moi, grandir, redécouvrir l’Amour et l’esprit de Famille. Et ce, grâce à Nicolas Noguier et Frédéric Gal.
En faisant partie de la Maison des Anciens Jeunes, aujourd’hui, entendez-vous rendre la pareille ?
Oui. J’ai décidé de devenir bénévole pour leur donner ce qu’on m’a appris. Car, comme moi à l’époque, ces personnes n’ont pas choisi de se retrouver à la fondation.
En décembre 2020, un important scandale a éclaté au sein de l’organisation, en réaction à l’enquête de Médiapart. Un audit a eu lieu, des articles et témoignages ont pointé du doigt la précédente direction, sur fond d’accusations de gestion et d’agressions sexuelles. Pourtant, ça n’a pas été votre cas, Frédéric Gal et Nicolas ont été très bienveillants envers vous. Qu’en est-il selon vous ?
Du temps où j’étais au Refuge, à Angers, j’étais en contact avec plusieurs jeunes et bénévoles et je n’ai jamais entendu parler de ça. Quand je les ai vus (pour la première fois), ils n’ont jamais rien essayé avec moi (après aussi). Je ne les imagine donc pas faire ça, je ne comprends pas pourquoi on les accuse de ça. J’espère que la justice rendra son verdict si jamais ils doivent passer au tribunal.
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Nicolas est le seul homme en France qui a eu l’idée de créer le Refuge, il y a 18 ans, d’aller devant les pouvoirs publics. Qu’est-ce que cela lui apporterait d’agresser sexuellement les jeunes qu’il a sauvés ? Rien. Pour moi, ces accusations sont fausses, on ne peut pas leur faire ça.
Diriez-vous qu’il y a une certaine jalousie face à son succès et à sa bienveillance ?
Oui. Quand on y regarde de plus près, le scandale intervient juste après que l’association soit passée au statut de fondation, ce n’est pas un hasard. C’est fait exprès, manigancé depuis des mois. D’autant que les attaques de certains collectifs, comme ADAR, visent tous ceux qui défendent l’ancienne direction (j’en ai été victime il y a quelques jours).
Je pense que le refuge, jusqu’ici tranquille et stable, dérangeait. Et, quand une fondation gêne, on trouve des accusations. Je n’aime pas ça. Comment peut-on prendre plaisir à faire du mal à des personnes qui se battent pour sauver ces jeunes LGBT ? On ne peut pas, ce n’est pas humain. Surtout que certaines des “victimes” ont été accueillies…
Et, c’est justement ce soutien à Nicolas Noguier et Frédéric qui a entraîné la suppression de la Maison des Jeunes de l’organigramme…
Oui. On l’a pris comme une trahison, un second rejet (de notre famille). Nous nous sommes dit : qu’est-ce qui se passe ? Pourquoi ? Qu’est-ce qui nous arrive ? qu’a-t-on fait pour subir ça ? Nous n’avons rien compris, n’avons rien fait (de répréhensible), à part peut-être ne pas approuver toutes les décisions.
Nous sommes humains, on ne mérite pas ça, nous sommes tous dans le même camp, accompagnons des jeunes pour qu’ils s’en sortent. C’est ça, nos actions. Rien d’autre. Comment une direction peut-elle faire ça, alors que nous avons déjà vécu le rejet de nos familles ? Ils nous excluent une seconde fois, c’est grave.
Bien qu’il ne fasse plus partie du Refuge, êtes-vous toujours en contact avec Nicolas Noguier ?
Oui. Régulièrement, on échange des messages, on s’appelle. Pour moi, Nicolas c’est comme un deuxième papa, un ami, je l’adore, il m’a sauvé la vie. Pourquoi ne serais-je plus en contact avec lui ?
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Je l’assume et le revendique, à la presse, sur les réseaux sociaux (et au téléphone avec lui aussi). Nicolas Noguier et Frédéric Gal ont tout mon soutien.
Pendant vos échanges, le sentez-vous ému, perdu, choqué de voir la tournure que prend la fondation ?
Je ne peux pas en parler à sa place. Mais, quand on en discute, oui. Il est triste, surpris. Mais, il sait très bien qu’il a fait un magnifique travail.
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Nicolas, si tu lis cet article : merci pour tout ce que tu as fait pendant 18 ans, merci d’avoir sauvé énormément de jeunes, de m’avoir secouru. Tu auras toujours mon soutien, on va tout faire pour que le refuge redevienne tel que tu l’as créé il y a 18 ans, avec l’esprit de famille et d’amour.
De votre côté, diriez-vous que la fondation a perdu de vue son engagement premier ?
Oui. La nouvelle direction prétend accompagner les jeunes, défendre la communauté LGBT. Pourtant, depuis quelques mois, semaines, des délégations ferment petit à petit, des bénévoles démissionnent, des mécènes renoncent à [nous] aider. Comment peut-on donc continuer à le faire sans eux ? Que vont devenir les personnes hébergées ? Qu’attend-elle pour dire stop ? Je trouve cela déplorable.
Il y a un gros problème de gestion, il est nécessaire que ça change, les responsables actuels doivent partir. Sinon, j’ai bien peur que l’organisation disparaisse pour tous, ce que je ne souhaite pas. Le Refuge, c’est une famille, il ne faut pas l’oublier. Cela ne peut pas se terminer dans ces conditions, la structure doit mener le combat de Nicolas Noguier jusqu’au bout afin qu’il n’y ait plus de rejet.