Lieu très apprécié des gays, le « cruising » est le rendez-vous drague et aventureux par excellence. En véritable espace intemporel, il a su traverser les époques jusqu’à ce aujourd’hui. On vous raconte.
Par Jean-Pierre du Méril

Le « cruising » est d’abord historiquement affaire de palissades. Point seulement celles, parisiennes, du jardin du Luxembourg, des Tuileries ou du Palais Royal où l’homosexualité a toujours trouvé à s’ébattre, entre urinoirs et labyrinthes, bosquets touffus, mais plus largement partout où, loin du regard de la ville ou du village, des rencontres viriles peuvent s’épanouir librement, à la sauvette, souvent sans les limites qu’imposeraient des rencontres disons plus traditionnelles, verbales d’abord, polies et policées.
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Pas de mots superflus dans le cruising : une approche directe. Préambules limités à une drague sexuée, franche, surtout si la saison permet un minimum vestimentaire, l’été par exemple, où un tee-shirt, un short, un maillot, un thong, un string… feront office de muleta (palo (« bâton ») compris), façon poutre apparente, poutre offerte par avance, quand elle n’est pas délibérément exhibée, sous couvert de naturisme, voire de nudisme pour le dire simplement.
Revenons-en à nos palissades !
A Louis XV quittant l’enfance et s’étonnant de ne plus voir aucun de ses amis s’amuser autour de lui, on répondit qu’ils avaient « arraché des palissades » dans les jardins de Versailles. En réalité, les compagnons en question avaient pris l’habitude de s’aventurer du côté des gardes et des grilles. Et ce, jusque dans la cour de Marbre, afin de s’isoler et de se manifester des désirs et des jeux nouveaux, au masculin. Ces « arracheurs de palissades » firent les beaux jours des mauvaises langues du Palais qui s’en réjouirent aussi. En particulier au souvenir de ces exercices de comparaisons appliquées auxquels ils s’étaient eux-mêmes prêtés autrefois avec jubilation. Le souvenir des amants de Monsieur, frère de Louis XIV, n’étaient pas si lointain. Les débordements divers de Mazarin non plus.
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Aux portes de la capitale, les bois de Boulogne et de Vincennes furent et sont toujours au diapason des lieux de rencontres de hasard et de consommation immédiate. Roger Peyrefitte - l’auteur des Amitiés particulières - à qui l’on demandait après quoi il courait en ces lieux répondit malicieusement : « Après la jeunesse ». Mais la jeunesse n’est pas l’apanage exclusif de ces rencontres, tant s’en faut. Cela en fait des lieux de libertinage et de camaraderie virile entre mecs consentants et aguerris le plus souvent. Une (bonne) pipe est toujours une pipe.