Mathieu apprend sa séropositivité à 19 ans, après le diagnostic “froid” d’un médecin. Comme beaucoup, il affronte seul la maladie, cherche de l’aide, une porte de sortie. Aujourd’hui indétectable, le jeune militant nous raconte son histoire.
A ce jour, Mathieu, vous êtes un des seuls jeunes séropositifs à témoigner à visage découvert pour le projet d’un journaliste reconnu et devant un certain nombre de personnes. Qu’est-ce que ça fait ? Etes-vous soulagé ?
Je me sens soulagé, oui. Témoigner à visage découvert pour raconter mon parcours et informer sur le VIH est une chose importante à faire. Aujourd’hui, il y a de plus en plus de jeunes qui témoignent.
A mes yeux, il est important d’informer les nouvelles générations sur les différentes méthodes de protection car non, le VIH n’arrive pas qu’aux autres.
Votre prise de parole a été courte mais incisive. Est-ce là le moyen de faire réagir tous les partis prenants sur la séropositivité : les médecins, les jeunes, la communauté LGBTQI+ ?
Oui, il faut faire réagir tout le monde. Avant d’être séropositif nous sommes avant tout des humains ! Je ne pense pas qu’il faille expédier un patient en cinq minutes suite à cette annonce. C’est ce qui s’est produit avec moi et j’en garde un souvenir douloureux. D’autant plus que j’ai eu beaucoup de difficulté ensuite à trouver un dentiste, dermatologue et même un kiné.
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A un moment, je me suis senti rejeté par la communauté alors que j’avais besoin d’eux pour m’en remettre. La désinformation et la méchanceté de certains peuvent totalement détruire la propre estime de soi. Je voulais dire aux jeunes et à la communauté de ne pas rejeter, insulter ou même simplement juger. Au contraire, il faut en parler et se soutenir. Dans mon cas, c’est l’association « Les Séropotes » et ses membres qui m’ont énormément aidé. Je ne les en remercierais jamais assez.
A l’époque, le diagnostic de votre séropositivité a été émis, selon vos dires, comme on envoie « une lettre à la poste ». Aujourd’hui, d’autres subissent-ils également la même chose ? Ou, au contraire, les spécialistes sont-ils plus humains qu’autrefois ?
J’ai l’impression que cela s’améliore au fil des années et heureusement. Même s’il y a toujours des cas isolés. Il y a déjà une grande part d’humanité quand on soigne d’autres personnes et que l’on en fait son métier.
Je pense que certains peuvent encore être mal informés sur le VIH aujourd’hui. Quand c’est le cas, je pense qu’il est difficile d’accompagner un patient correctement.
Votre vie s’est-elle arrêtée lorsque tu as appris ta séropositivité ?
C’était une de mes premières pensées le jour où j’ai appris que j’étais séropositif. Mais non, la vie continue, et je peux même dire que c’est une nouvelle vie qui commence.
Aujourd’hui, vous êtes en couple avec une personne séronégative, avez un logement, Mathieu. Etes-vous heureux ? Auriez-vous pensé cela possible ?
Quand on m’a annoncé cela, je commençais une nouvelle vie à Paris avec mon petit copain, je pensais tout perdre en un claquement de doigt, mais j’ai eu beaucoup de chance.
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Aujourd’hui, je suis marié à cet homme qui me soutient et m’accompagne depuis toutes ces années. Je n’aurais jamais pensé que cela soit possible, et pourtant si. Et j’en suis très heureux.
Envisagez-vous d’avoir des enfants ? Avez-vous d’autres projets en tête ?
J’ai un neveu et un filleul qui sont formidables, j’adore les enfants mais je n’ai aucune envie de devenir papa et j’ai de la chance d’avoir un mari qui est sur la même longueur d’onde. Nous aimerions beaucoup acheter un appartement, mais nous préférons attendre que la Covid soit passée.
Plus d’infos :
Mathieu milite auprès de l’association Les Séropotes pour les droits de sa communauté